Cet article a principalement été écrit pour des athlètes d’un club d’escrime, afin de leur faire réaliser l’importance de la musculation et de la préparation physique en complémentarité avec leur sport.
La préparation physique aide à améliorer les capacités physiques générales et spécifiques, à prévenir les blessures et à optimiser les performances athlétiques d’un individu. Pour sa part, l’entraînement en musculation vise à développer une structure solide sur laquelle viendra s’appuyer les performances futures. Quant aux choix d’exercices pour développer une base de force musculaire, les exercices pluri-articulaires et complexes que sont le squat, les fentes avant et arrières, les développés, les tirages ainsi que les exercices de gainage abdominal dont la planche ventrale et les rotations à la poulie sont à privilégier. Il y a de nombreux avantages à pratiquer la musculation, par opposition à l’escrime seulement. Tout d’abord, l’entraînement en musculation permet d’isoler des muscles sous-développés beaucoup plus rapidement que l’activité en elle-même. Un exemple serait de palier la faiblesse des muscles du mollet pour permettre des fentes plus explosives. Aussi, beaucoup d’escrimeurs sont limités par leur puissance et leur accélération, d’où la nécessité de s’exercer avec une résistance significative. “Gonfler ses muscles” ne se produira que si un escrimeur s’entraîne exclusivement avec des poids très lourds, dans une amplitude réduite et avec un volume trop grand. S’il maintient une amplitude dans ses mouvements, s’étire et implique plusieurs articulations dans ses exercices, ils ne deviendra pas « gonflé » ni ne ralentira dans ses gestes, contrairement à la croyance populaire. Enfin, l’escrime est un sport asymétrique, ce qui signifie qu’il sollicite et ne développe qu’un des côtés du corps. L’entraînement en résistance enlève une partie de cela, ce qui réduit les risques de blessures et contribue à restaurer l’équilibre et la mobilité de l’ensemble du corps.
1- Améliorer la récupération
L’escrime est essentiellement un sport anaérobie, où les combats durent généralement entre 3 et 5 minutes et à des intensités qui sollicitent peu le système aérobie. En revanche, l’entraînement du système cardiovasculaire, et plus particulièrement du VO2max, permet essentiellement d’améliorer la capacité de récupération de l’athlète.
L’escrime est principalement caractérisé par des mouvements brefs et à haute vélocité (ex. attaques) et de périodes d’effort à faible intensité (ex. position en garde). Les actions explosives durent quelques secondes et sollicitent le système ATP-CP, tandis que les mouvements continus de faible intensité durent entre 15 et 60 secondes et impliquent plutôt le système d’énergie aérobie. L’endurance cardiovasculaire et le VO2max ne sont pas des critères déterminants de la performance en escrime, contrairement à une activité comme le cyclisme ou la course à pied par exemple. Toutefois, c’est le système aérobie qui est responsable de la resynthèse de l’ATP, soit l’énergie musculaire utilisée pendant un effort. Ainsi, en plus d’aider à supporter les efforts sous-maximaux de l’escrimeur comme les changements de direction, le système aérobie sert à regénérer les mécanismes anaérobie durant les interruptions du combat. De plus, comme les journées de compétition sont assez longues et comportent plusieurs combats espacés, l’entraînement du VO2max permet donc à l’athlète d’avoir une meilleure endurance tout au long de la journée.
Modalités d’entraînement
Pour le VO2max de l’athlète, l’entraînement par intervalles courts à haute intensité (EITC ou de l’anglais HIIT) devrait être privilégié à l’entraînement de type continu, avec des périodes de travail et de repos similaires à un combat. Cette méthode d’entraînement étant plus spécifique aux sports intermittents.
Exemples :
– Sauter à la corde pendant trois minutes, repos passif pour une minute, répétez ce cycle.
– Jogging pendant 2min30, sprint pendant 30 secondes, répétez ce cycle.
La longueur des intervalles peut aussi varier selon les armes utilisés, la touche au sabre étant beaucoup plus courte qu’à l’épée.
Sabre: Travail de 5 secondes, repos de 25 secondes
Fleuret: Travail de 5 secondes, repos de 15 secondes (ratio 1:3)
Épée: Travail de 15 secondes, repos de 45 secondes
Enfin, une échelle d’agilité, des mini-haies ou un step peuvent aussi être incorporés dans les séances, afin d’améliorer le jeu de pieds, l’agilité et la capacité à changer de direction.
2- Améliorer l’explosivité de ses attaques
Dans les sports de combat, une grande proportion de la vélocité des coups et des attaques provient de la force générée par le bas du corps. En procurant une base de support stable et solide, les jambes poussent contre le sol et transmettent l’énergie accumulée au tronc et aux bras. Plus l’énergie accumulée à la fin de la chaîne est élevée, et plus l’impact sera grand.
Modalités d’entraînement
Le squat et la fente doivent être considérées comme des exercices fondamentaux pour l’explosivité, puisqu’ils sollicitent les quadriceps, principal muscle extenseur de la jambe. Exécutez ces exercices avec une bonne technique et à pleine amplitude de mouvement, comme lorsque vous êtes retrouvez en position extrêmement étendue en fente dans un combat. Si vous passez tout votre temps à vous entraîner avec la même jambe en avant, vous pouvez faire du travail supplémentaire pour l’autre jambe afin d’éviter un déséquilibre de force musculaire.
La fente (figure 1a-c) est la forme la plus commune de l’attaque. On estime à près de 140 les attaques effectuées dans les seuls matchs d’élimination. Une attaque bien exécutée prendra environ 300 millisecondes pour être complétée. Ceci est plus rapide que le temps nécessaire à un muscle pour atteindre une production de force maximale (réf. ci-bas). En ce sens, les exercices de pliométrie ou de sauts, qui mettent l’accent sur l’accélération de la force, sur la puissance et sur la vitesse d’exécution, sont extrêmement efficaces. À certains égards, ceux-ci sont également plus spécifiques à l’escrime que d’autres mouvements exécutés lentement sur machine guidée par exemple.
3- Améliorer sa vitesse, son agilité et son équilibre
La vitesse et l’agilité en escrime s’exprime généralement à partir de la position en garde mais parfois aussi dans un certain nombre de positions durant un combat. Le but de l’entraînement de la vitesse, de l’agilité et de l’équilibre est de conditionner les systèmes nerveux et musculaires à produire de la force musculaire de façon rapide et bien coordonnée, même lorsqu’on est en mouvement ou en situation de déséquilibre. Ce type d’entraînement a l’avantage de procurer des appuis solides, rendant ainsi les déplacements plus aisés. Enfin, les muscles responsables du gainage (stabilité du tronc) et la proprioception sont aussi très importants à entraîner. Plus vous êtes fort et stable sur vos jambes, et plus rapidement vous pouvez accélérer, décélérer et changer de direction.
Modalités d’entraînement
Un programme de vitesse, d’agilité et de jeu de pieds devrait inclure des démarrages et des courts sprints impliquant des changements de direction spécifiques à l’escrime. Ces séances doivent être effectuées avec un effort maximal à chaque sprint et en maintenant une vitesse (quasi-)maximale. Une session typique peut se composer de 3 à 5 séries de 8 à 12 sprints (repos entre les séries = 2-4 min, repos entre les répétitions = 1-2min).
Exemples:
Suicides : pouvant s’effectuer en sprint normal, sur une seule jambe ou en position d’escrime.
– Navette 5m-10m-5m
– Navette 2m-4m-2m
4- Avoir une meilleure précision
L’escrime est un sport qui nécessite une bonne coordination oculo-manuelle ainsi qu’une précision extrême. Quel que soit le type d’arme que vous utilisez, vous devez être plus rapide et plus précis que votre adversaire. Ce qui exige de la force, de la vitesse, de la synchronisation ainsi que des habiletés techniques. De ce fait, une grande partie du contrôle du haut du corps provient des épaules.
Modalités d’entraînement
Le military press et le développé des épaules (mouvement au-dessus de la tête) sont parmi les meilleurs exercices pour renforcer les épaules. Notez que si vous passez beaucoup de temps à vous entraîner avec un seul bras, vous aurez probablement besoin de faire du travail supplémentaire sur le bras opposé pour un développement équilibré. Les exercices de la coiffe des rotateurs tels que les rotations externes du bras permettront d’améliorer la stabilité de l’épaule et de diminuer votre risque de blessures. Les rotations externes peuvent être effectuées en se tenant debout à côté d’une poulie, le bras collé sur le corps et en tirant le bras à l’extérieur contre la résistance du poids.
@ Crédit photo principale: Robert Scales
Références:
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Fit for fencing: part 2, Excelsior group, James Marshall, 08 mai 2013.
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